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Santé publique : l’impossible n’est pas Africain - PANA RADIO
Santé publique : l’impossible n’est pas Africain - PANA RADIO

L’Afrique est le continent le plus vulnérable sur le plan sanitaire. Son système de santé publique connait sérieusement des problèmes si bien qu’il urge d’agir. Les statistiques couchées dans cet article en termes de présentation du tableau de santé publique sur le continent font peur et interpellent les consciences de tous. Mais comment renverser la tendance ? Comment le continent pourrait-il atteindre sa souveraineté sanitaire et se repositionner sur l’échiquier mondial ?… C’est à toutes ces questions et bien d’autres, que cet article se réserve le droit d’apporter des réponses.

En Afrique, la couverture sanitaire universelle, n’est que de 46 %. Et, l’accès potentiel possible aux services essentiels n’est que de 47,4 %. Près de 7,8 % de la population du continent consacre plus de 10 % de ses revenus aux dépenses de santé. Ce qui interpelle encore, c’est que l’Afrique et l’Asie abritent 97 % de la population mondiale qui est appauvrie par les dépenses directes de santé. Pourtant, c’est aussi la région où l’on enregistre un taux très moins élevé du pouvoir d’achat de la population, faute d’emplois. Ces chiffres couchés dans l’Atlas des statistiques sanitaires africaines 2022, publié fin 2022 par le bureau de l’organisation mondiale de la santé (OMS) branche Afrique, viennent rappeler qu’aucun Africain n’a droit au sommeil. Chacun doit faire quelque chose en faveur de la santé de la santé publique sur le continent.

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Sachant que l’Afrique est la troisième plus grande région au monde après l’Asie du Sud-Est et le Pacifique occidental avec une population estimée à 1 120 161 000 personnes et en croissance continue au cours des dix dernières années (26,9 %), et qu’elle représente jusqu’en début 2023, 14,4 % de la population mondiale, évaluée à 7 758 157 000 d’habitants, il urge de penser grand !

Ça fait très mal aujourd’hui, de réaliser que sur le continent, plus de 500 000 personnes meurent chaque année de la tuberculose en Afrique. Ce n’est pas tout, car rien qu’en 2018,  environ 44 personnes sur 100 000 sont mortes du sida. A cela il faut encore ajouter que le taux de mortalité maternelle reste très élevé, avec plus de 525 décès pour 100 000 naissances, à en croire toujours l’Atlas.

Pire encore, renseigne toujours le document, bien que l’Afrique subsaharienne ait connu une réduction substantielle du taux de mortalité maternelle d’environ 38 % depuis 2000, les choses ne sont pas conséquemment améliorées. Car, comment pourrait-on comprendre qu’en 2020, 96 % de tous les décès aient été dus au paludisme ? C’est une preuve, notent les Nations Unies, que «l’Afrique supporte le plus lourd fardeau de la morbidité palustre ». Parallèlement, les données consultées font constater que « près de 80 % des pays de la Région ont une prévalence élevée ou très élevée du retard de croissance chez les enfants de moins de cinq ans ». Toutes ces statistiques viennent mettre en évidence, le besoin d’une gamme de réformes profondes de santé publique en Afrique.

Climat et santé

Bien que très peu pollueuse, l’Afrique paye le lourd tribut découlant du changement climatique qui secoue le monde. Car, tenez, le Continent investit entre 5 et 15 % de son produit Intérieur brut, pour faire face aux effets désastreux du changement climatique, selon les différents rapports des Nations Unies. Cette situation qui s’accompagne d’une vague de catastrophes naturelles, fait de l’Afrique une région de plus en plus vulnérable, avec des effets accélérateurs de la précarité de son système de santé. Nous en remettant aux données de l’Atlas, il s’avère que l’Afrique est aujourd’hui avec 622 cas de catastrophes naturelles,  la deuxième Région la plus touchée après l’Asie qui en compte 1305 au cours de la période d’entre 2010 et 2020. Voilà qui a depuis un temps, impacté négativement le système de santé publique en Afrique.

Des sérieux problèmes de santé publique

L’on sait déjà à partir des explications du Docteur Ghanéen Bernard Appiah, spécialiste en communication sur la santé publique, que la santé publique consiste plutôt en une « science et un art de prévenir les maladies, de prolonger la vie et de promouvoir la santé et l’efficacité physiques à travers les efforts coordonnés de la communauté, par l’assainissement de l’environnement, le contrôle des infections dans la population, l’éducation de l’individu aux principes de l’hygiène personnelle »…

L’on sait en plus toujours selon Bernard Appiah, que la santé publique s’intéresse à « l’organisation des services médicaux et infirmiers pour le diagnostic précoce et le traitement préventif des pathologies, le développement des dispositifs sociaux qui assureront à chacun un niveau de vie adéquat pour le maintien de la santé, l’objet final étant de permettre à chaque individu de jouir de son droit inné à la santé et à la longévité…» Mais une question pertinente demeure…

En ce qui concerne les soins prénatals et les accouchements, notent les Nations unies, « les familles des zones urbaines et rurales ne sont pas toujours suivies par un personnel de santé qualifié, ce qui compromet le bien-être et l’avenir de l’enfant ». Pourtant, « la protection de la santé des nouveau-nés et des adultes passe notamment par la vaccination, dont la couverture est en recul dans le monde entier, ainsi qu’en Afrique ».

Des sujets dignes de réflexion

Le système sanitaire continental a encore beaucoup à faire. Imaginez, l’Afrique consomme assez peu des médicaments dont elle est elle-même productrice. Sur le plan vaccinal par exemple, il a été révélé à la troisième édition de la CPHIA 2023, que « Seuls cinq pays africains, à savoir le Maroc, l’Égypte, le Sénégal, l’Afrique du Sud et la Tunisie en produisent localement », selon le directeur du centre de contrôle des maladies CDC Afrique, le Docteur Kaseya. Cela veut tout simplement dire, que plus ou moins 49 pays Africains ou plus, importent leurs vaccins… Pour quel coût financier sur leurs économies, de surcroit fragiles ? D’aucuns pourraient s’imaginer la suite.

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Pourtant, le continent est frappé par des épidémies et pandémies auxquelles la recherche des solutions devrait révolutionner l’industrie médicale d’une région au moindre taux d’investissements médico-pharmaceutiques. Les maladies non transmissibles à l’occurrence l’AVC, hante les Comores, la malaria menace la RDC alors que le cancer du col de l’utérus frappe le Togo selon Hayathe Ayéva,  citoyenne togolaise… très peu d’initiatives sont prises pour des solutions durables. Malheureusement !

Pourquoi l’Afrique n’arrive-t-elle pas à assoir son système de santé publique ?

Plusieurs facteurs entrent en ligne de compte. De l’absence de la politique de santé publique globale pour chaque pays en passant par la pauvreté économique de plusieurs Etats, le manque d’infrastructures sanitaires dans nombreuses régions du continent, l’insécurité alimentaire,… tous ces éléments en disent long. Les Nations Unies renchérissent à ce point, que « l’accès aux services essentiels est suivi grâce à trois critères essentiels, le score le plus bas à l’échelle régionale étant le critère essentiel de l’accès physique (29,6), comparé à l’accès financier (55,2) et à l’accès socioculturel (57,4). Les populations ne peuvent pas se rendre dans des établissements fournissant des services essentiels ». Un bémol n’est-ce pas ? Les mêmes sources précisent que la dénutrition est responsable d’environ 45 % des décès d’enfants de moins de cinq ans dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.

Pourtant, lors de son intervention au cours d’une formation des journalistes sur les notions de santé publique à Lusaka en Zambie à l’occasion de la troisième conférence sur la santé Publique en Afrique CPHIA le 28 Novembre 2023 dernier ; le Dr Bernard Appiah, a précisé que la santé publique offre aujourd’hui plusieurs services, qui s’apparenteraient même comme qui dirait, à ses composantes.

C’est en passant : la surveillance sanitaire, le diagnostic et l’enquête, le partenariat et la mobilisation de la communauté, l’élaboration des politiques, l’application des lois, la fourniture des soins, l’assurance de main d’œuvre qualifiée, l’évaluation et la recherche. Ce n’est qu’en respectant tous ces éléments, que l’on pourrait informe-t-il, parler de la santé publique. Ils doivent tous entrer en une inter complétion, car ils fonctionnent comme un tout !

Mais hélas !

Toutes ces composantes sont loin d’entrer en ligne de compte en Afrique, voilà qui explique même, la précarité de la santé publique sur le continent. C’est une situation qui fait peur ! Car, comme disait le Docteur Jan Kaseya, directeur général de CDC Afrique lors de la 3ème conférence sur la santé publique en Afrique CPHIA, tenue à Lusaka fin Novembre, «Si une seule personne, un seul pays n’est pas en sécurité au niveau sanitaire, aucun autre pays ne l’est, et les récentes pandémies nous l’ont enseigné»,… C’est une preuve que personne n’est épargné des revers du dysfonctionnement du secteur de la santé publique en Afrique.

L’organisation, la structuration et la pensée de la santé publique ne sont pas une impossibilité Africaine…

Conscient de tous ces différents défis qui guettent le système sanitaire public Africain, Kaseya insiste sur « la nécessité d’adopter une approche de santé mondiale incluant l’Afrique ». Ce sera également, une formule sûre, pour « repositionner l’Afrique sur l’échiquier sanitaire mondial ».

Mais comment y arriver ?

L’Alliance mondiale pour les vaccins et l’immunisation (GAVI), encourage les pays africains à accroître leur production de vaccins, et non continuer de dépendre des importations.  Côté CDC Afrique, son directeur note que son institution a mis en place des « Partenariats pour la fabrication de vaccins en Afrique » (PAVM). Cette idée fait office du renfort de « l’écosystème de production des vaccins continentaux ». Et il motive je cite : « l’objectif étant d’arriver à couvrir les besoins de vaccination du continent d’ici 2040 », fin de citation. « En produisant nos propres vaccins, convainc Kaseya, nous pouvons garantir un accès équitable à ces produits essentiels et protéger nos communautés contre de futures pandémies ».

Cette initiative saluée par nombreux participants à la conférence de Lusaka, leur fait penser que « grâce aux efforts concertés et au soutien continu des partenaires mondiaux, l’Afrique peut briser les barrières et se repositionner en tant que leader mondial de l’innovation en matière de santé publique ».

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S’inspirer des autres pour réussir

Quelques-uns parmi les Etats Africains, doivent donner des leçons aux autres pour résoudre cette question. Au Maroc par exemple, « 70% des médicaments sont produits localement », a fait savoir le Ministre de la santé et protection sociale au Maroc, Monsieur Khalid Aït Taleb, lors de sa prise de parole à la CPHIA.

Ce modèle marocain mérite d’être dupliqué sur tout le continent avec bien-sûr des améliorations. Et, il faut le reconnaitre autant que le ministre, cela demande que « les États travaillent main dans la main pour promouvoir la santé publique en Afrique, enfin de renforcer la résilience des systèmes de santé et de favoriser l’accès aux soins de santé adaptés aux femmes et aux filles ». Ce qui, poursuit-il, « permettrait d’assurer la sécurité sanitaire face aux menaces telles que les catastrophes naturelles et les maladies infectieuses ».

Innovation et technologie,… faire appel à l’IA demeure une nécessité en Afrique…

La résolution des problèmes de santé publique sur le continent, dévient de plus en plus un facteur nourricier d’ambitions gigantesques en Afrique. L’on est sorti de l’ordinaire, si bien que lors de la conférence, les participants ont pensé au recours à l’intelligence artificielle (IA), pour révolutionner le secteur sanitaire public du continent. Jean Philbert Nsengimana, Conseiller numérique en chef pour CDC Afrique, estime à ce sujet, qu’il est « important que l’Afrique ne passe pas à côté de l’adoption de l’IA. Des institutions comme le CDC Afrique ont fait preuve de leur volonté pour mettre cette innovation au service de la Santé publique » sensibilise-t-il.

« Je pense que la production de médicaments est l’un des domaines dans lesquels l’IA peut se trouver la plus utile », allègue pour sa part, Nelly Wakaba Ale, responsable des écosystèmes sanitaires à Mastercard Foundation. D’ailleurs, cette Mastercard Foundation a promis de « débloquer 1,3 milliard de dollars d’ici 2024 en partenariat avec les Centres africains de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique) « pour sauver la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes en Afrique » à en croire toujours Nelly.

Dans la même perspective, Mastercard Foundation indique avoir lancé l’initiative dénommée « Sauver des vies et des moyens de subsistance ». Elle attend soutenir « la fourniture des vaccins à des millions d’autres personnes à travers le continent, jeter les bases de la fabrication de vaccins en Afrique en mettant l’accent sur le développement du capital humain » et enfin « renforcer le CDC Afrique ». Une fois matérialisée, cette approche, pourra peut-être raviver l’Industrie médico-pharmaceutique sur le continent.

Des efforts supplémentaires

Sous un autre chapitre en outre, pour venir en appui à la reforme de santé publique en Afrique, les Nations Unies ont mis en place depuis un temps, « le treizième programme général de travail ». Ce programme qui couvrait la durée allant de 2019 à 2023, concentrait « son attention sur les cibles du triple milliard afin d’avoir des effets mesurables sur la santé des populations au niveau des pays ». Il prévoyait à cet effet :

  • Un milliard de personnes supplémentaires bénéficiant de la couverture sanitaire universelle ;
  • Un milliard de personnes supplémentaires mieux protégées face aux situations d’urgence sanitaire ;
  • Un milliard de personnes supplémentaires bénéficiant d’un meilleur état de santé et d’un plus grand bien-être.

Tout cela, dans l’objectif « de transformer l’avenir de la santé publique » sur le continent. Ainsi, fort des résultats peu reluisants, l’organisation mondiale de la santé OMS, a dû prolonger ledit programme jusqu’en 2025 pour espérer rattraper les insuffisances. Mais comment y arrivera-ton sans moyens ? Voilà pourquoi il est nécessaire d’appliquer la « Déclaration d’Abuja » pour « mobiliser des ressources supplémentaires auprès du secteur public en faveur du secteur de la santé dans les pays africains ».

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La communication, un besoin pour accompagner la politique sanitaire en Afrique

En outre, tous ces efforts doivent être appuyés par une communication bien pensée. Le CPHIA l’aura peut-être déjà compris. Car en foi de cela, elle a offert une bourse à une quarantaine de journalistes issus de plusieurs Etats du continent, pour couvrir la 3ème conférence sur la santé publique en Afrique, du 27 au 30 Novembre 2023. Ces journalistes ont été outillés sur des notions de santé de santé publique, sur comment assurer la couverture médiatique des sujets de santé, et j’en passe… Quelle chance donner à la réussite de nouvelles démarches continentales dans le domaine de santé publique en Afrique ? La politique en pleine implémentation par le CDC Afrique aboutira-t-il ? Laissons le temps au temps !

 

John TSONGO, Journaliste et écrivain Africain passionné des questions de science, environnement et recherche des solutions aux problèmes du millénaire.

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